Un dialogue avec la ville et le théâtre
Situé sur un terrain exigu le long d’une grande artère du centre de Bruxelles, le bâtiment s’ancre au tissu urbain environnant, en rentrant dans les alignements existants et en répondant à la typologie mitoyenne des façades classiques du XIXème siècle. Ce dialogue tant avec le contexte urbain qu’avec le contenu de l’art du spectacle a induit un travail sur la façade faite de transparence et d’opacité, comme un voile tiré sur les mystères du spectacle.
La parcelle exiguë présente une surface au sol de 2500m2 et impose à la construction une configuration très compacte sur plusieurs niveaux. Les distributions verticales ainsi que les moyens de levage sont donc des éléments clefs pour l’usage du bâtiment.
Les foyers en continuité avec l’espace public
Le nouveau bâtiment a permis au Théâtre National d’affirmer son autonomie et une visibilité encore jamais connue depuis sa fondation en 1945. Dans ce projet, les contraintes sont devenues des espaces de liberté: il s’agissait de traduire les enjeux de l’institution tout en respectant les gabarits du boulevard haussmannien et en s’insérant dans l’exiguïté de la parcelle.
Il en résulte, entre autres, une façade transparente tout en rythmes et nuances qui se distingue de ces voisines tout en s’insérant dans l’ensemble du boulevard.
L’implantation ne permettant pas l’aménagement d’un espace public extérieur, celui-ci est intégré à l’intérieur et prend la forme de foyers généreux potentiellement lieux d’expressions artistiques «hors les salles». Ces foyers sont conçus comme une extension de l’espace public du boulevard.
3 salles, 3 atmosphères, 3 utilisations
Les trois salles assemblées de manière très compacte offrent des caractères et usages très différents.
La grande salle, à “géométrie variable”, comporte 750 places. Elle permet des spectacles à l’Italienne, à l’Elisabéthaine, ainsi que diverses autres configurations de spectacle et de gradinage. Une continuité scène/salle s’impose. L’ensemble est donc plongé dans le noir. Elle est comparée à un grand piano. La petite salle, de 250 places et configuration à l’Italienne, favorise un rapport intime entre spectateur et acteur. Il en résulte une ambiance chaleureuse qui fait écho au son d’un violoncelle. La salle de répétition est de taille identique au plateau de la grande salle et pourra accueillir des spectacles pour un public de 150 spectateurs dans une configuration de studio.
Dans les interstices, laissés libres par ces trois salles, se glissent toutes les fonctions indispensables au fonctionnement d’une machine à produire et accueillir des spectacles. Les stocks décors, les locaux administratifs, les loges l’atelier costumes, un studio son, des ateliers machinos, stocks électros, stocks costumes, locaux techniques et autres trouvent encore leur place dans cet ensemble. Le résultat est comparable à une fine mécanique, à un corps vivant composé d’organes et de nervures complémentaires les uns des autres.
Scénographie et acoustique, les complices intimes de l’architecture.
Dans la grande salle, les multiples configurations attendues ont poussé à un usage accentué de passerelles au-dessus des spectateurs, un cadre de scène aussi large que la salle afin de garantir la continuité spatiale et une que cage de scène équipée d’une grande quantité d’équipes manuelles et de motorisées sous les passerelles latérales et du lointain. A cela s’ajoute le proscenium pouvant servir de fosse d’orchestre, de gradin ou de plancher en prolongation de la salle et de la scène suivant les configurations. Dans la petite salle on retrouve une mêle logique de passerelles sur scène et sur salle afin de garantir une grande souples d’usage, malgré le rapport scène-salle figée dans une configuration à l’italienne. Le studio offre quant à lui, les dispositifs des salles polyvalentes par un gril couvrant l’ensemble de la surface et un gradin mobile sur les quatre faces du studio et dans des jauges très variables.
Vu la configuration extrêmement serrée des trois salles, l’isolation acoustiques entre les trois outils scéniques fut de toute première importance. Les structures portantes de chacune de ces salles sont autonomes, ce qui fut une prouesse particulièrement pour le studio qui se superpose à la grande salle.
Autre difficultés : l’isolation de chacune de ces salles alors qu’un seul et même foyer les distribue et accueille leur public à l’entracte ou en fin de soirée. Une grande attention fut donc portée également à tout un ensemble de détails de menuiseries et de parachèvements afin d’isoler par des sas, d’atténuer par des absorbeurs de son, tout en garantissant la portance de la voix dans chacune des salles.