Une enveloppe patrimoniale
La Chapelle de l’ancien Couvent des Ursulines est un exemple remarquable d’architecture classique datant du début du XVIII° siècle. Les façades et la toiture sont aujourd'hui classées. L’intérieur, irrémédiablement privé de son espace original et de son usage initial, offre cependant un potentiel d’utilisation qu’une réaffectation adéquate mettra à profit, dans le respect de la mémoire du lieu.
L'ensemble de la bâtisse occupe un lieu désormais stratégique dans la Ville de Mons, à proximité de la gare et de Sainte-Waudru.
Les trois dimensions du volume global originel
La présence de planchers en béton, destructrice d’un monument historique, est ici transformée en opportunité : d’un monument abimé, la chapelle devient un lieu de stockage doté d’une enveloppe à valeur patrimoniale. Encore faut-il qu’une fois la porte franchie, la magie de cette enveloppe ne s’oublie pas d’un coup.
C’est l’enjeu des deux options principales qui conditionnent l’aménagement intérieur : une faille verticale s’ouvrant sur toute la hauteur de l’édifice, et la libération visuelle complète du rez-de-chaussée.
Ces deux ouvertures permettent d’appréhender les trois dimensions du volume global originel de la chapelle.
L’ouverture visuelle du rez-de-chaussée permet également de révéler la mécanique de fonctionnement de l’institution : l’espace de réception des œuvres, dans lequel s’affiche la scénographie au ralenti des caisses mystérieuses qui arrivent et qui repartent, constituent un décor en mouvement pour l’accueil du public. Seul les sépare une paroi de verre sécurisé, impénétrable et inviolable. Ici encore, c’est la dialectique du mystère et de la révélation qui joue.
La faille verticale, quant à elle, reçoit un escalier monumental que l’on voit pénétrer les profondeurs de l’édifice, frôlant les anciens reliefs muraux redécouverts. Cette faille en dit autant sur l’édifice ancien que sur la fonction nouvelle, révélant autant le volume originel que la succession des étages fermés, contenant les milliers d’objets dont un échantillon a été aperçu au rez-de-chaussée.
Dans la faille, une résille d’acier soutient tous les plateaux. Elle s’insère dans le rythme de l’architecture ancienne tout en gardant un contraste : son dessin léger s’oppose à la massivité de l’ancien. Sa légère inclinaison renforce la sensation de verticalité.
La lumière qui provient de la faille invite le visiteur, dès l’accueil, à découvrir l’espace de la nef latérale. Dans un moment d’intensité dramaturgique, le visiteur peut enfin apercevoir toute la verticalité du bâtiment et les vestiges des anciens décors.
Autour de ces deux gestes architecturaux, le programme se structure et se subdivise en quatre entités dont une est accessible au public : les salles du rez-de-chaussée et le centre de documentation du premier étage, les trois autres étant dédiées au personnel scientifique et aux espaces de restauration, de gestion, de logistique et de réserve (sur six niveaux).
Une fois à l’intérieur de la chapelle, le public est accueilli dans le hall par une scénographie qui met en confrontation des technologies numériques de consultation et des vitrines contenant des œuvres réelles.
Une « cabine de d'accueil » rappelle le stockage des œuvres elles-mêmes, mais également la cabine de pilotage de cette énorme machine, à la fois centre d'information, régie de sécurité et zone de stockage à elle seule.
Au centre de la grande nef, le public découvrira une stèle. Celle-ci symbolise la mémoire du lieu, renvoie le visiteur à une atmosphère à la fois sacrée et intemporelle et introduit la centralité de l'artothèque dans le réseau muséal montois.
Le public pourra ensuite, via une installation multimédia interactive projetée sur les parois des réserves de grands formats, découvrir le fonctionnement de l'ensemble des réserves de l'Artothèque.
Le visiteur peut poursuivre le parcours scénographique. Les salles dans la nef latérale contiennent des dispositifs numériques « d’immersion » permettant la découverte virtuelle d’œuvres numérisées confrontées à la présentation d’œuvres « réelles.
Au premier étage de la nef latérale, le centre de documentation, ample espace dont la modénature de l’ancien décor est conservée, constitue un espace public plus réservé, dédié aux chercheurs. Les grandes ouvertures existantes donnent une vue vers la faille dans la grande nef et établissent une communication visuelle avec les espaces d’accueil du public.
Le programme comme une fiction écrite pour un unique comédien
Le programme de l’Artothèque paraît calqué sur l’édifice qui l’accueille. Donner une visibilité au stockage des œuvres d’art est un enjeu étonnant, auquel personne n’aurait sans doute pensé si la présence de cet édifice à l’histoire tourmentée ne rencontrait d’une part le besoin pressant d’une institution, et l’opportunité du projet Mons 2015.
Il s’agira donc de répondre au-delà de la fonction de conservation, qui supposera un déploiement d’attentions et de précautions techniques et logistiques.
L’occasion est belle de manifester en quoi cette habitude culturelle de conserver l’art du passé, habituellement réservée à des experts et cachée du public en dehors des espaces de monstration dédiés, est elle-même riche de révélations possibles, autant dans ses méthodes que dans ses principes fondateurs.
Une machine technique
Les œuvres sont un trésor au cœur de l’édifice, inaccessible au public, mais dont la présence réelle sacralise le lieu.
L’enveloppe de cette châsse urbaine est restaurée dans le scrupuleux respect de son architecture originelle, faite de pierres blanches, briques badigeonnées de rouge et ardoises de schiste. Au travers de la nouvelle vitrerie qui refermera les grandes baies, la nouvelle fonction s’affirmera avec discrétion.